Les Jeux Olympiques et Paralympiques de Paris 2024

Un méga-événement pour dynamiser la mégarégion ?

*Lab'Urba, **Université Gustave Eiffel, Lab'Urba, École d'Urbanisme de Paris
Publié le

13 octobre 2021

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Les Jeux Olympiques et Paralympiques (JOP) sont le plus grand méga-événement sportif au monde : plus de 2 millions de visiteurs à Londres 2012 ; 11 305 athlètes de 206 pays et 25 700 représentants des différents médias pour Rio 2016 ; Tokyo 2020 représentant une exception dans le contexte pandémique. À l’échelle mondiale, leur audience télévisuelle est estimée à quatre milliards de téléspectateurs. Ils mettent la ville hôte, les territoires où se déroulent les épreuves et plus globalement le pays sous le feu des projecteurs. Les dossiers de candidature invoquent ainsi souvent les JOP comme outil pour dynamiser le tourisme. La mégarégion pourrait-elle bénéficier plus globalement des retombées dues à l’organisation des JOP ?

Des Jeux Olympiques et Paralympiques concentrés en Île-de-France

En 2017, Paris a obtenu l’organisation des Jeux Olympiques et Paralympiques (JOP) de 2024. La candidature a misé sur leur compacité : plus de 20 épreuves se dérouleront dans un rayon de 10 km autour du Village Olympique et Paralympique (VOP) et la majorité des épreuves sera localisée en Île-de-France. Dans cette région, trois types de sites liés à la compétition peuvent ainsi être distingués (carte 1) :

  • Des sites à construire, peu nombreux (village des athlètes, village des médias, centre aquatique olympique), qui seront par la suite destinés aux habitants de Seine-Saint-Denis.
  • De nombreux sites existants, parfois rénovés pour l’accueil d’épreuves, principalement localisés dans Paris intra-muros ou en petite et grande couronne (la base nautique de Vaires-sur-Marne à l’Est de la capitale ou encore le Stade Roland-Garros).
  • Des sites temporaires, qui accueilleront des infrastructures uniquement pour le temps des JOP (épreuves de tir sur le terrain des Essences en Seine-Saint-Denis qui sera ensuite rattaché au parc Georges-Valbon de La Courneuve), sites à haute valeur touristique qui mettront en valeur le patrimoine francilien (Champs-de-Mars, jardins du château de Versailles, place de la Concorde, Grand Palais, etc.).

Les sites olympiques en île-de-France

Carte 1 : Les sites olympiques en île-de-France

Quelques épreuves (voiles, surf, certains sports collectifs) se dérouleront en dehors d’Île-de-France, mais aucun site d’épreuve ne se situe dans la mégarégion. Lors de la sélection des sites de compétition pour le dossier de candidature en 2015, plusieurs sites de la mégarégion souhaitaient accueillir les épreuves de voiles, notamment la ville du Havre soutenue par le département de la Seine-Maritime, qui misait sur sa connexion via la Seine avec Paris. De plus, le territoire avait déjà accueilli les épreuves de voile des JOP de 1924. Comme pour Paris cela aurait constitué un clin d’œil à cette édition passée mais la candidature n’a finalement pas été retenue.

Dans un tel contexte, des retombées sont-elles possibles pour la mégarégion au-delà de l’IÎe-de-France ? La suite de la fiche explore des retombées possibles pour les territoires périphériques de la mégarégion : d’une part, l’attraction de touristes fondée sur la promotion du patrimoine, et d’autre part le financement possible d’équipements et la promotion de la pratique du sport liés à l’accueil des centres d’entrainement et d’hébergement des délégations olympiques.

Les JOP, un outil au service de la diffusion des touristes internationaux au-delà de l’Île-de-France ?

En raison de sa localisation au cœur de nombreuses infrastructures ferroviaires, routières et autoroutières, Paris est facilement accessible et permet une diffusion des flux dans la mégarégion. Certains touristes olympiques, n’étant jamais venus ni à Paris ni en France, pourraient prolonger leur séjour et visiter des sites touristiques emblématiques en Île-de-France, comme le château de Versailles ou la ville de Fontainebleau, ou d’autres sites touristiques majeurs de la mégarégion (cf. carte 2) comme le Mont Saint-Michel ou les sites liés au débarquement de la Manche, qui sont déjà fréquentés par de nombreux visiteurs internationaux. L’offre touristique hors Île-de-France vient alors compléter celle de la région parisienne et l’ensemble de la mégarégion parisienne peut espérer des retombées. Toutefois, la littérature met en évidence que, souvent, des effets d’éviction existent ; les touristes olympiques se substituant aux touristes habituels (Delaplace, 2020). En outre, la diffusion des touristes internationaux repose sur des politiques de valorisation et de communication des territoires touristiques de la méga-région. Ainsi, les sites touristiques peuvent utiliser les JOP pour se renouveler, créer des expositions autour de cet événement ou plus simplement rénover leurs espaces d’accueil.

Sites touristiques et territoires « Terre de Jeux » dans la méga-région parisienne

Carte 2 : Sites touristiques et territoires « Terre de Jeux » dans la méga-région parisienne

Par exemple, la région Normandie souhaite associer le 80ème anniversaire du Débarquement en 2024 aux JOP. Pour cela, et avant même l’attribution des Jeux à Paris, les acteurs de la Région se sont mobilisés et souhaitent que la flamme olympique puisse arriver par les plages du débarquement. De plus, des sites touristiques entament des rénovations pour cet anniversaire, comme celui de la batterie allemande de Longues-sur-Mer ou le musée du Débarquement.

Poursuivant son engagement, la Région Normandie s’est également mobilisée très tôt dans les actions liées à la préparation des JOP, puisqu’elle a été la première région à se mobiliser pour obtenir le label Terre de Jeux 2024. En effet, cette stratégie de labellisation peut également contribuer à la venue de touristes internationaux (Région Normandie, 2020).

Une diffusion des touristes internationaux conditionnée par les stratégies olympiques des acteurs locaux

Afin de bénéficier des retombées des JOP, les collectivités territoriales (communes, communautés de communes, agglomérations, départements voire régions) peuvent candidater au label « Terre de Jeux » jusqu’en 2024. Ce label, premier de l’histoire des JOP, a pour objectifs de célébrer les Jeux sur le territoire national et de contribuer à l’héritage immatériel en développant la pratique sportive et en favorisant l’engagement des habitants. Il permet ainsi d’associer des territoires hors Île-de-France à la dynamique de développement territorial générée par les JOP. Une fois labellisées, les collectivités pouvaient également candidater (jusqu’en 2019 et 2020 pour les sports additionnels) pour être centre de préparation et héberger une équipe de sportifs en amont et pendant les Jeux. C’est ainsi une opportunité pour les territoires de la mégarégion de bénéficier des retombées des JOP. Ainsi, lors de Londres 2012, le territoire du Nord-Pas-de-Calais s’était positionné comme base arrière de ces Jeux en raison de sa proximité avec Londres et de ses capacités d’hébergement. Plusieurs équipements sportifs avaient accueilli des délégations étrangères comme par exemple le complexe gymnique d’Arques, le Vélodrome de Roubaix ou encore la base d’aviron de Gravelines (Deffrennes, 2011).

Les centres de préparation aux Jeux (CPJ) ont été choisis en octobre 2020 par le Comité d’Organisation des Jeux Olympiques (COJO) en fonction d’un cahier des charges établi avec le Comité International Olympique (CIO). Les équipements sportifs choisis devaient répondre aux normes des Fédérations Internationales mais également être facilement accessibles, bénéficier d’hébergements et de services de restauration ou encore disposer de services médicaux à proximité. Sur les 1 600 équipements sportifs candidats, portés par 750 collectivités territoriales, Paris 2024 a sélectionné 623 centres de préparation (dont 258 dans la mégarégion), répartis sur 415 collectivités1. Certains équipements des centres de préparation choisis par un comité de pilotage bénéficieront d’une rénovation financée par l’Agence Nationale du Sport. Un catalogue permet de visualiser l’ensemble des équipements disponibles par discipline et le choix des sites est effectué par les Comités Nationaux Olympiques (CNO). Les sites sont ensuite mis à disposition pour trois ans, de la fin des Jeux de Tokyo aux Jeux de Paris, et les équipes peuvent y séjourner et s’y entraîner pour la période et la durée souhaitées.

Même s’ils sont répartis sur la quasi-totalité du territoire français (95 départements ont au moins un site), les centres de préparation sont concentrés dans la mégarégion. En effet, sur les 10 départements français accueillant le plus de centres de préparation (de 18 à 29 centres), 6 se trouvent dans la mégarégion (Seine-Maritime (25), Oise (25), Seine-Saint-Denis (19), Yvelines (19), Val-d'Oise (21) et Val-de-Marne (29), dont quatre en Île-de-France). L’ancienne région Nord-Pas-de-Calais dispose de nombreux centres de préparation (21 dans le Nord et 28 dans le Pas-de-Calais) et 41,5 % des CPJ (Centres de préparation aux Jeux) sont situés dans la mégarégion dont 21,3 % hors Île-de-France (cf. carte 3).

Les Centres de Préparation aux Jeux en France métropolitaine et dans la mégarégion
Carte 3 : Les Centres de Préparation aux Jeux en France métropolitaine et dans la mégarégion

Si l’objectif premier pour les territoires ayant des centres de préparation est d’obtenir des subventions afin de rénover des équipements sportifs, certaines communes y voient aussi l’opportunité de faire connaitre leur territoire en espérant des retombées médiatiques (à l’échelle régionale) et la dynamisation de l’économie locale. Ces centres de préparation, s’ils sont choisis par les CNO, pourraient en effet permettre de développer le tourisme sportif mais aussi d’autres formes de tourisme par l’attention médiatique dont ils feront l’objet pendant et après 2024. Mais cette dynamisation du tourisme nécessitera d’autres politiques de valorisation et de communication autour de leurs principaux sites touristiques emblématiques.

Ainsi si le département des Ardennes n’accueille aucune épreuve des JOP, il se positionne cependant comme terre d’accueil pour les sportifs avant et pendant les JOP. Avec cinq sites (maison départementale des sports à Bazeilles, le lac des Vieilles-Forges, Plaine des sports de Bogny-sur-Meuse, la salle Reine Bestel à Charleville et le complexe sportif du bois du Han à Fumay2), labellisés CPJ, accueillir des délégations permettra au territoire de valoriser l’économie locale, de mettre en avant ses atouts mais également d’encourager la pratique sportive3. De plus, des enjeux en terme d’image sont également présents pour le département qui cherche à améliorer son image4. Situé dans une relative proximité à Paris, le territoire propose diverses structures sportives pour l’accueil des athlètes sur son territoire. Avoir des équipements labellisés CPJ permettra de laisser un héritage aux habitants en rendant les sites totalement accessibles aux personnes à mobilités réduites. Par ailleurs dans une volonté d’attractivité territoriale et afin d’attirer les délégations olympiques internationales dans ses CPJ, le département des Ardennes prévoit d’effectuer des travaux d’aménagement pour améliorer la qualité de service, des travaux d’entretien sur des sites patrimoniaux, ainsi qu’une réflexion sur le plan de circulation (Conseil départemental des Ardennes, 2020).

Ainsi, de par sa proximité avec l’Île-de-France et ses équipements, la mégarégion pourrait bénéficier de retombées liées aux JOP, malgré l’absence des sites d’épreuves. Mais ces retombées ne sont pas automatiques. Il est nécessaire que les acteurs de ses territoires s’investissent en amont et préparent l’organisation et l’accueil de cet événement.

1 Données récoltées en mai 2021.

2 https://prepare.paris2024.org/fr/search/?page=3&geo-areas=France%20M%C3%A9tropolitaine

3 https://cd08.fr/le-cd08-en-action/sport-loisirs/les-ardennes-terre-de-jeux-2024, https://cd08.fr/actualites/le-cd08-engage-pour-les-jeux

4 https://www.sportmag.fr/les-ardennes-renvoyer-une-image-positive-grace-aux-jop-2024/

Bibliographie

Conseil Départemental des Ardennes, Direction générale des Services Départementaux, 2020, Éducation, sports et culture, 18 p.

Deffrennes G., 2011, 2012, Les J.O du Nord-Pas-de-Calais, in Holz J-M (Ed)., « Les Jeux Olympiques et leurs territoires », 247 p.

Delaplace M., 2020, The relationship between Olympic Games and tourism: why such heterogeneity? Towards a place-based approach, in Delaplace M. and Schut P.-O. Hosting the Olympic Games: Uncertainty, debates and controversy”, Routledge

Département de Seine-Maritime, 2015, Communiqué de presse : JO 2024 : le Département regrette que la ville du Havre n’ait pas été retenue aux épreuves de voile, en ligne : https://www.seinemaritime.fr/docs/dpt76-candidature-du-havre-pour-les-epreuves-de-voile-aux-jeux-olympiques-et-paralympiques-2024.pdf, 1 p.

Direction Générale des Entreprises, 2019, Mémento du Tourisme Édition 2018, en ligne : https://www.entreprises.gouv.fr/files/files/etudes-et-statistiques/chiffres-cles/memento-tourisme/2018-memento-tourisme.pdf  148 p.

Houiller-Guibert C-E., 2021, La mobilisation normande pour les Jeux olympiques de 2024, Hypotheses, en ligne : https://oggc.hypotheses.org/558

Paris 2024, non daté, Terre de Jeux 2024 Partout en France vivre et faire vivre laventure des Jeux, en ligne : https://terredejeux.paris2024.org/plaquette_paris2024.pdf 12 p.

Paris 2024, non daté, Terre de Jeux 2024 Guide du Candidat Collectivités, en ligne : https://terredejeux.paris2024.org/guide_du_candidat.pdf  33 p.

Paris 2024, octobre 2020, Centre de préparation aux Jeux, en ligne : https://www.amf.asso.fr/m/document/fichier.php?FTP=cf5306d89eb4bb39a7d8c2049e7ee7c8.pdf&id=40325, 12 p.

Région Normandie, 2020, Communiqué de presse Assemblée plénière de la Région Normandie, 5 p.